Des espoirs douchés

Alors que tu étais sous la douche, en train de compter les grains de beauté de ton bras gauche, elle est venue à toi. D’abord fugace, elle a très vite pris de la place jusqu’à s’imposer dans tes pensées. Cette idée te permettra de mettre un terme à la faim dans le monde, de comprendre pourquoi abréviation est un mot aussi long et de trouver l’âme sœur. C’est ton moment Eurêka !

Le hic, c’est qu’enivré par le parfum eucalyptus de ton gel douche Ushuaïa, l’idée, pourtant si claire il y a encore trente secondes, s’estompe doucement. Alors, tu réagis.

Mais, le temps de sortir de la douche, d’aller dans le salon récupérer une feuille de papier et un stylo, de tenter de la noter, de te rendre compte que ton taux d’humidité est bien trop élevé pour le papier qui se délite à l’approche de ta main, de chercher une serviette pour te sécher les mains, de reprendre une nouvelle feuille de papier, ton idée a disparu.

Plus rien. Ton esprit te parait vide. Tu devrais en être fier, les maîtres zen mettent des années à atteindre un tel état. Mais tu t’en fous. Tu as envie de tout casser. Le genre humain est passé à côté d’une révolution. Si seulement tu avais acheté ce carnet de notes sous-marin.

En te retournant, tu peux voir ton voisin d’en face qui t’observe avec curiosité. Dans ta précipitation, tu avais oublié ce vis-à-vis. Finalement, ton unique point commun avec Archimède a été de te balader à poil.