Enquête d’inspiration
Auteur à succès d’une dizaine de polars, Wilfried Larkins s’est lancé avec plein d’entrain dans l’écriture de son nouveau roman. Le titre était déjà tout trouvé « Le spore tue ». Une histoire policière mélangeant athlètes de haut niveau et champignons toxiques. L’occasion pour Magnus Olson, son détective dépressif, de reprendre du poil de la bête après son éprouvante enquête du dernier bouquin.
Seulement, après avoir écrit les cinquante premières pages de son livre, Wilfried fit la rencontre de ce qu’il ne pensait être qu’une légende pour midinettes effarouchées. Le syndrome de la page blanche. Plus rien ne lui venait.
Le premier jour, il entreprit d’aller se promener. La nature l’avait toujours aidé à rassembler ses pensées. Sa production littéraire en retour de balade était généralement excellente. Cette fois-ci, rien. Le curseur de son logiciel de traitement de texte le narguait en clignotant toutes les secondes. Deux heures à le fixer sans être capable d’écrire le moindre mot. Dépité, Wilfried referma son ordinateur et partit se préparer un bon repas.
Cette étrange danse dura exactement un mois. Un mois pendant lequel la frustration de Wilfried grandit à la même vitesse que son tour de hanche. Jusqu’à atteindre un point de non-retour. Un coup de hachoir sur l’écran 14 pouces de son MacBook Pro. « Au moins là, j’aurais une raison valable de ne plus écrire » ironisa Wilfried, en espérant secrètement que c’était l’électrochoc dont il avait besoin pour relancer la machine.
Mais non. Cette panne sèche d’inspiration se prolongea encore pour des mois. Il a tout tenté : ateliers d’écritures, psy, drogues hallucinogènes, retraites spirituelles. Rien n’y faisait. Il s’est même inscrit dans une association de mycologie pour approfondir ses connaissances sur les champignons, avant d’en claquer la porte rapidement pour cause d’incompatibilité d’humeur. Le coupable ? Une blague de mycologue plutôt moyenne : vous savez pourquoi il faut toujours inviter ses copains chez soi ? Parce qu’il ne faut recevoir l’ami qu’au logis.
Le déclic eut lieu au salon du livre de la Bourboule. Une fan inconditionnelle, du type prof de français un peu vieille fille qui collectionne les coupures de presse sur son auteur favori, vint à lui pour une dédicace. « Dites Monsieur Larkins, de quoi va parler votre prochain livre ? J’espère que Magnus va s’en sortir, sa dernière enquête a l’air de l'avoir bien amoché. » Ce genre de question qui appelait d'ordinaire à un rire un peu faux-cul et une réponse toute faite promettant du grand spectacle. Cette fois pourtant, quelque chose s’est déclenché en lui.
En quête d’inspiration depuis des mois, il n’a jamais pensé à utiliser les outils du détective Olson pour mener sa propre enquête sur l’inspiration.
Pour retrouver le feu sacré, il lui faudra remonter à la source de son écriture. Partir à la rencontre de sa muse. Ça ne va pas être facile. En partant il y a dix ans maintenant, elle ne lui a laissé que peu d’indices pour la retrouver. Suivre sa piste va demander à Wilfried d’employer toutes les techniques d’investigation confiées à son héros.
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