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La Dame Blanche

On m’avait pourtant prévenu : « Ne jamais sortir après minuit. » « De terribles choses se sont passées. Si affreuses que personne n’ose en parler. » Et je m’y suis tenu pendant six mois. Je m’y suis tenu jusqu’hier.

Hier, je suis sorti promener la chienne après minuit. Parce qu’il faisait doux, parce que la lune était belle, parce que je souhaitai prendre l’air. A vrai dire, je n’avais pas fait attention à l’heure. De toute manière, qui viendrait me chercher des poux dans la pénombre, avec un berger allemand en liberté ?

C’était sans compter sur La Dame Blanche. Avant même de la voir, je l’ai entendu. Là, au coin d’une rue dont le lampadaire clignote. Sa démarche claudicante, les chaines qui trainent au sol, de curieux jappements qui accompagnent ses pas, une voix stridente grommelant des phrases incompréhensibles. J’en ai eu froid dans le dos (ce qui, entre nous soit dit, n’était pas désagréable en cette soirée caniculaire…). La crête dorsale de Laika s’est hérissée comme jamais. Quelque chose de grave allait se passer.

Soudain, je l’ai aperçu. Une véritable vision d’horreur. Sous une apparence de petite grand-mère tranquille qui prépare de bons petits gâteaux pour ses petits-enfants, elle cache pourtant bien son jeu. C’est au bout de son bras droit que se trouve le véritable objet de ma terreur.

Dans sa main se trouve un méli-mélo de laisses pour retenir sept molosses mexicains à poils courts. Sept guerriers de l’Apocalypse au nom barbare de chihuahuas. Ou plutôt chiouafouaf tant le niveau sonore a augmenté à la vue de Laika.

Devant tant de haine, nous n’avons pu que battre en retraite pour sauver notre peau. Et c’est passé à un poil près. Plus jamais je ne sortirai passé minuit. Que se serait-il passé sans Laika… Je n’ose l’imaginer.