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Les épiceries marseillaises ou l’éloge de la lenteur

Qu’il est difficile de se sortir le logiciel parisien de la tête. De demander que tout soit rapide et efficace. Ceci au profit de la sacro-sainte individualité. « Je suis plus important que tout le monde, mes rendez-vous comptent plus que ceux des autres, mon temps a plus de valeur ». Quelle bêtise.

Et cela, le capitalisme l’a très bien compris. Faire la queue dans une supérette est trop désagréable pour votre humble personne ? Nous allons vous proposer des caisses en libre-service. Vous serez à même de vous encaisser vous-même. Outre une plus grande rapidité (qui entre nous soit dit est discutable tant les bugs, les produits incompatibles et les codes-barres cachés sont fréquents), cela vous garantira de n’avoir personne à saluer. De vous consacrer à vous-même.

Le meilleur remède à cette envie d’efficacité est de venir faire un tour à Marseille. Ici, le temps a son propre cours. Les gens ne sont pas pressés. Même leur accent prend son temps. Ils prononcent toutes les lettres, articule bien. Pour prolonger la discussion, ils inventent des « g » qu’ils viennent accoler à tous les mots se terminant en « ien ».

C’est troublant au début. Et puis ça fait se poser des questions, revoir ses habitudes. Pourquoi courir comme ça ? Suis-je si pressé de retourner m’enfermer dans mon appartement aseptisé ?

Le dernier exemple de cela était une virée à l’épicerie du coin. Au moment de faire la queue, tout le monde se cause. Les Marseillais restent ouverts à la rencontre, au sourire fugace. Chacun y va de son anecdote. Et dans le brouhaha le plus complet, les gens paraissent heureux. Petit florilège du jour :

  • A la caissière : La prochaine fois que ti vas au Maroc, ti me ramèneras de l’Amlou ?
  • A son voisin dans la queue : Et toi, tu as des enfants ? Attends que je te montre la photo des miens.
  • A moi : Les medjoul, c’est les meilleures ! Si tu veux en trouver des bonnes, va à Noailles. Ils ont deux trucs de bien là-bas : les pickpockets et les dattes !