Un arbre aux mille noms
Retournons en forêt pour nous émerveiller des formidables caractéristiques de l’un des arbres les plus connus d’Afrique : le baobab.
Il tire son nom de l’arabe ابو هيباب (abu hibab), qui veut dire fruits à nombreuses graines. Et c’est peu dire tant son fruit, le bien-nommé « pain de singe », en contient des centaines. Leur goût m’apparait plutôt quelconque mais il est considéré comme un superaliment, bourré en vitamine C, en calcium, en potassium et en antioxydant.
Pour de nombreuses cultures subsahariennes, le baobab est un arbre sacré. Il sert de lieu de rassemblement, où, petits et grands, viennent écouter les contes des anciens ou débattre de sujets pressants pour la communauté. C’est ainsi qu’il a gagné le surnom d’arbre à palabre.
Ce positionnement central au sein des villages est aussi renforcé par le fait que sa présence est le signe d’une nappe phréatique proche de la surface. Les êtres humains vont donc avoir tendance à s’installer autour de lui, et à creuser un puits à proximité afin d’assurer au village un approvisionnement quotidien en eau.
Mais ce puit n’est pas nécessairement à côté de l’arbre. L’arbre lui-même peut devenir une citerne. Cela est rendu possible grâce aux propriétés imputrescibles de son tronc. Il s’agit d’une pratique unique aux habitants du village d’Ampotaka, au Sud-Ouest de Madagascar. Ces derniers perpétuent une longue tradition. Ils aménagent une cavité en creusant l’intérieur de l’arbre, puis ils la laissent cicatriser. Quand arrive la prochaine saison des pluies, ils vont pouvoir transvaser l’eau des mares aux alentours et ainsi la conserver pour permettre au village de survivre aux saisons sèches. Cette fonction de citerne naturelle lui a donné le nom d’arbre bouteille.
Un autre petit nom est celui d’arbre de vie ou arbre pharmacien. Un bon nombre de propriétés médicinales sont associées au baobab. Fruits, feuilles et écorces sont utilisées en tant que remèdes traditionnels contre, entre autres, la diarrhée, le paludisme et la fièvre.
Le seul à oser critiquer le baobab était Antoine de Saint-Exupéry, dans son Petit Prince. Après sa toilette, ce dernier s’occupait à toiletter sa planète pour en arracher les baobabs dès qu’il pouvait les distinguer des rosiers. Ceci de peur qu’ils la fassent éclater en grandissant.
Pourtant, ce grief ne semble être que de l’esbroufe. L’écrivain-aviateur aurait utilisé cette analogie pour illustrer l’importance de s’occuper des problèmes à la source et de ne jamais rien remettre au lendemain. De là à surnommer le baobab arbre de sagesse, il n’y a qu’un pas.
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